
FISCALITÉ
Exonération des plus-values professionnelles de nature agricole ou d’entreprise de travaux agricoles en fonction du chiffre d’affaires
Publié le 30.06.2025
Exonération des plus-values professionnelles de nature agricole ou d’entreprise de travaux agricoles en fonction du chiffre d’affaires : La frontière floue entre le chiffre d’affaires ordinaire et les recettes exceptionnelles à considérer certainement dans le futur !
Les petites entreprises, dont font partie la majorité des exploitations agricoles ou entreprises de travaux agricoles, pour lesquelles la moyenne du chiffre d’affaires des deux exercices précédents n’excède pas un certain seuil peuvent bénéficier d’une exonération d’impôt sur le revenu et des cotisations sociales (agricoles « MSA ») sur leurs plus-values d’actifs, même en cas de cession isolée d’un bien, c’est-à-dire hors des situations de ventes de fonds ou d’entreprises, pouvant être exonérer par ailleurs selon d’autres modalités et textes fiscaux.
Ainsi, le dispositif codifié à l’article 151 septiès du CGI, dispositif bien connu des exploitants et entrepreneurs de travaux agricoles, trouve désormais à s’appliquer lorsque le montant moyen des chiffres d’affaires réalisés au titre des exercices clos au cours des deux années civiles qui précèdent la date de clôture de l'exercice de réalisation des plus-values, est inférieur à 350 000 € .
Au-delà, une règle de trois s’applique pour réduire la part exonérée jusqu’à taxer à 100 % la plus-value professionnelles réalisée en cas de dépassement du chiffre d’affaire moyen antérieur de 450 000 €.
Ces seuils ont été majorés de 100 000 € à compter des clôtures des comptes intervenues au cours de l’année civile 2023.
Une jurisprudence récente est venue rappeler que les recettes annuelles - ou chiffres d’affaires en matière agricole - à prendre en considération pour les comparer aux seuils de 350 ou 450 000 €, s’entendent comme étant issus des revenus générés par l’entreprise dans le cadre de son activité normale et courante, en tenant compte, le cas échéant, de son modèle économique...dont sa politique de renouvellement de matériels, périodique ou non, c’est-à-dire comprise par le fisc comme étant quasiment programmée ou non !
Cette interprétation a été retenue par une cour administrative, en cohérence avec une définition déjà consacrée dans d'autres contextes.
Ainsi, pour une société exerçant une activité de travaux agricoles, le seuil de recettes à considérer inclut les revenus tirés de la vente de matériels agricoles (!), dès lors que ces ventes s’inscrivent dans le cadre habituel de renouvellement des équipements utilisés pour l’activité professionnelle de la société.
Pour l’inspecteur ayant diligenté le contrôle fiscal de cette entreprise de travaux agricoles, TOUT COMME POUR LA COUR ADMINSITRATIVE D’APPEL de PARIS, la valeur de « reprise » ou de vente des matériels renouvelés ne peut plus être considérée comme du chiffre d’affaires exceptionnel, eu égard au caractère « courant » du renouvellement périodique pour cette entreprise, d’une partie de ses matériels ou équipements.
Ne constituant plus des recettes ou chiffres d’affaires exceptionnel, cette valeur de « reprise » des matériels doit donc selon cet inspecteur et la Cour administrative d’appel, être rajoutée à la valeur du chiffre d’affaires courant, issu de son activité d’entreprise de travaux agricoles, pour y être comparé aux seuils d’exonération des plus-values professionnelles de 350 et 450 000 €.
Bien évidemment, même avec des Chiffres d’affaires moyens bien en deçà du seuil d’exonération à 100% des plus-values (350 000 €), si 2 tracteurs de 150 et 200 CV étaient changés au titre du même exercice, avec un renouvellement à neuf tous les 4 ans par exemple, il est probable que c’est une valeur moyenne de l’ordre 180 à 220 k€ qui serait à rajouter au chiffre d’affaires moyen annuel ordinaire...soit plus de 50 % du seuil, ainsi « consommé » rien que par la valeur de reprise du matériel dans notre hypothèse.
L’on voit bien ici l’intérêt de l’inspecteur eu égard aux besoins de recettes du Trésor Public. Mais cela va carrément à l’encontre des besoins d’accompagnement de la profession, et de la volonté politique - affichée en tout cas - des pouvoirs publics, encore récemment, traduite par l’augmentation réalisée en 2023 du seuil d’exonération de ces plus-values professionnelles pour les professions agricoles dont les entrepreneurs de travaux, et à compter de 2024 plus particulièrement, en faveur des jeunes agriculteurs.
Le fait que ces produits soient comptabilisés en tant que produits exceptionnels, conformément aux règles comptables, n’a pas d’incidence sur cette appréciation.
D’ailleurs, de nouvelles règles du plan comptable, obligent à considérer le produit des ventes des matériels ou actifs durables, comme devant être comptabilisés en produits courants.
L’existence de politique de renouvellement périodiques et « groupées » au sein de l’entreprise ne fera que renforcer le caractère courant de recettes à intégrer dans le calcul du chiffre moyen à ne pas dépasser pour conserver une exonération de plus values professionnelles. Exonération, qui rappelons le, pour les entreprises de travaux agricoles à failli ne pas être maintenue au plan social MSA en ce début d’année 2025 !
Remarque : l’administration, dans ses commentaires au BOFiP (BOI-BIC-PVMV-40-10-10-20 §390)), retient une appréciation plus favorable au contribuable, selon laquelle les recettes issues de la cession d’éléments de l’actif immobilisé doivent être exclues. La question est certainement : Jusqu’à quand ?
Références : CAA PARIS, 28 mars 2025.
Bien entendu, des précautions et principes juridiques et comptables existent pour que vous professionnels de l’agriculture, puissiez maintenir en l’état de la législation et en dépit de cette jurisprudence très défavorable, une exonération de plus-values professionnelles sur cessions d’actifs et non d’entreprise. Les conseillers et comptables du CERFRANCE (AGC) Gascogne Occitane restent à votre disposition pour en évoquer leur mise en œuvre, toutes autres conditions remplies par ailleurs.
Jacques ARTIS - Responsable fiscal AGC Gascogne Occitane.